L’acheteur peut demander réparation de son préjudice même en l’absence de dol
Une société de démarchage est chargée de la commercialisation d’un programme immobilier à vendre en état futur d’achèvement. Par son intermédiaire, un couple achète l’un des appartements à titre d’investissement locatif bénéficiant d’un avantage fiscal. Six ans après, l’appartement a considérablement perdu de sa valeur et la rentabilité de l’investissement est défavorable. Le couple estime avoir été mal renseigné sur son projet et agit, à titre principal, en nullité de la vente pour dol contre le démarcheur, le vendeur, la banque et les assureurs. À titre subsidiaire, il sollicite la réparation de son préjudice patrimonial et moral en raison des fautes commises par le démarcheur dans l’exécution de son obligation d’information et de conseil. La nullité de la vente pour dol n’est pas retenue, mais le démarcheur est condamné à indemniser le couple en dommages et intérêts au titre de la perte de chance d’avoir pu effectuer un investissement plus rentable. La vente étant maintenue, le démarcheur fait valoir que sa responsabilité ne peut pas être engagée.
La Cour de cassation rejette son pourvoi. Elle retient que le rejet de la demande en nullité de la vente pour dol ne fait pas obstacle à une demande subsidiaire en responsabilité du démarcheur et en indemnisation du préjudice en résultant pour l’acheteur qui reste propriétaire du bien.
À noter : 1. Les vices de consentement sont une cause de nullité relative du contrat (C. civ. art. 1131). Indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle (C. civ. art 1178 al. 4). La Cour de cassation rappelle que l’action en nullité de la vente pour vice de consentement et l’action en indemnisation du préjudice de l’acheteur sont distinctes. Elle avait déjà jugé que l’action en nullité n’exclut pas la possibilité pour la victime d’agir en réparation de son préjudice (Cass. 1e civ. 25-6-2008 n° 07-18.108 F-PB) car ces deux actions n’ont pas le même objet (Cass. 3e civ. 11-1-2012 n° 10-23.141 FS-PB : BPIM 2/12 inf. 138).
2. La condamnation du démarcheur s’appuie sur la perte de chance de l’acheteur d’avoir pu négocier le contrat à des conditions plus avantageuses, ou d’y renoncer. La Cour de cassation a d’ailleurs appliqué la solution à l’occasion d’une quinzaine de décisions rendues le même jour à son encontre. Relevons que la responsabilité du notaire peut également être retenue si sa faute participe au préjudice de la victime (Cass. 3e civ. 15-3-2018 n° 17-11.850 F-D : SNH 12/18 inf. 5, retenant l’absence de dol et condamnant le notaire à indemniser l’acheteur pour perte de chance de négocier une réduction du prix).
Pauline PERPOIL
Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Vente immobilière n° 16830
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Cass. 3e civ. 14-1-2021 n° 19-24.881 FS-P
Source : https://www.efl.fr/actualites/immobilier/vente-immobiliere/details.html?ref=f0d3f6e65-71ec-41f5-a7be-f406b7d4652a